Vous vous promenez dans la rue au Japon. Là, devant vous, déambulent de nombreux jeunes Japonais habillés en habits traditionnels. Les filles arborent un très beau kimono avec de longues manches : le furisode. Comme il fait froid, une jolie fourrure blanche leur sert d’écharpe. Certains garçons abordent un aspect plus occidentalisé et optent pour un costard élégant. Et là, vous vous souvenez que vous êtes en janvier et qu’un jour férié correspond à ce que vous voyez : le Seijin Shiki, ou “cérémonie de la majorité”. Quelle est cette fête, quelles sont ses origines et qu’est-ce qu’on y fait ?
Le Seijin Shiki, c’est quoi ?
Seijin Shiki (成人式、せいじんしき) ou aussi appelé Seijin no Hi (成人の日), célèbre les Japonais atteignant l’âge adulte. Elle se déroule le deuxième lundi du mois de janvier. Au Japon, la majorité est à 20 ans et non à 18 ans comme la plupart des pays occidentaux. En ce jour qui dit adieu à leur enfance, les jeunes portent de très jolis vêtements pour marquer le coup. C’est un peu le début d’une nouvelle vie.
Les origines du Seijin Shiki
Seijin Shiki a des origines shintô et non bouddhistes. En fait, cela remonterait à l’ère Nara (710–794) lors des rites de passage à l’âge adulte. Dans ces temps-ci, il n’y avait pas vraiment de loi indiquant à quel âge un individu était considéré comme adulte. La majorité était alors un concept plutôt confus et peu encadré, il existait cependant :
- une cérémonie nommée Genpuku pour les garçons d’environ 10 à 15 ans ;
- un rituel nommé Mogi pour les filles de 12 à 16 ans.
Ces âges restaient toutefois approximatifs.
Lors de cette fête, il s’agissait d’aller au sanctuaire et de recevoir la bénédiction du kami veillant sur sa famille. C’est également le jour où l’on recevait ses habits d’adulte et pour les garçons, un nouveau nom. En général, les filles se noircissaient les dents (oui, c’était à la mode), se rasaient les sourcils et se maquillaient pour l’occasion.
Malheureusement, ce genre de célébration n’était souvent réservé qu’aux nobles. Puis lors de l’ère Kamakura (1185–1333), la classe guerrière assura sa domination et on inclut en plus les fils de samurai. D’ailleurs, ces enfants recevaient leur armure et leur sabre lors de ce passage à l’âge adulte. Ce n’est qu’à l’époque Muromachi (1338–1573) que le Seijin no Hi devint accessible au peuple.
Il faudra attendre l’époque Meiji (1868-1912) pour que la majorité soit enfin fixée à 20 ans pour tout le monde.
De 1948 à 2000, le Japon fêtait le Seijin Shiki le 15 janvier, mais décida finalement de l’instaurer le deuxième lundi du mois de janvier.
Note : Depuis 2015, les Japonais ont le droit de vote à 18 ans, ainsi que de jouer au pachinko. Cependant, cela ne change pas le fait que la majorité reste bien à 20 ans. La raison ? Parce que la population de l’archipel vieillit de plus en plus et que le nombre de jeunes diminue avec. Le Gouvernement souhaite en effet que ces derniers s’investissent plus dans la vie politique du pays.
Que fait-on lors du Seijin Shiki ?
Déjà pour participer à cette cérémonie, il faut bien sûr avoir 20 ans :
- depuis le 2 avril de l’année précédente ;
- ou si on les atteindra avant le 1er avril de cette année.
Il faut recevoir l’invitation de la mairie où on réside.
En général, la fête du Seijin no Hi se déroule dans une salle de conférences, avec les représentants de la mairie. Même s’il s’agit d’un jour férié, la cérémonie en soi n’est pas vraiment longue : environ 1 heure tout au plus. La célébration s’ouvre avec l’hymne national japonais. S’ensuivent ensuite des discours d’encouragements, un sermon sur la responsabilité que détiennent désormais ces Japonais et des animations dans le cas des plus grandes municipalités.
La famille et l’intéressé se rendent ensuite au sanctuaire afin de prier pour sa réussite dans sa future vie.
Après cela, c’est selon le goût de chacun : certains décident de fêter ce jour particulier dans un izakaya afin de siroter leur première bière avec leurs proches.
Certaines villes incluent les étrangers atteignant l’âge de 20 ans sur le sol japonais.
Le Seijin no Hi, voué à évoluer ?
De moins en moins de jeunes décident de participer à ces festivités. En fait, les vêtements requis sont souvent très coûteux, d’une part. D’une autre, de plus en plus de personnes ne se sentent plus si adultes à l’âge de 20 ans, avec les responsabilités qui leur tombent dessus. Ainsi, nombreux sont ceux qui déchantent et souhaitent se détacher de toutes ces obligations. C’est notamment cette forme de protestation que l’on retrouve dans le monde du travail.
Reste à voir s’il y a un réel regain d’intérêt dans les années à suivre. Sinon, cette fête sera amenée à évoluer, pour imposer un code vestimentaire moins sévère, par exemple. Par ailleurs, il est prévu que la majorité soit instaurée à 18 ans à partir d’avril 2022. Cela jouera-t-il en faveur de cette cérémonie très ritualisée ou au contraire, cela amplifiera-t-il cette impression de déconnexion face au monde adulte ?
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Article écrit par Leila Casarin
Un commentaire
Sandrine - Français automatique
J’ai le sentiment que le Japon a toujours été entre traditions et modernité.
Il est difficile de trouver la balance entre ces deux mondes mais pas impossible.
Je pense que la tradition fait parti de l’identité d’un peuple et d’un pays mais qu’elle ne doit pas figer une société dans un temps qui n’existe plus.
Garder certain rituel comme celui du Seijin Shiki est une bonne idée mais il faudrait l’adapter comme mentionner en fin d’article 🙂
Merci pour cette jolie découverte d’un aspect de la culture japonaise !